Sinfonieta IX

SINFONIETA IX

15′ – 2018

pour mezzo soprano, orchestre et chœur

« Redécouvrant la 9eme symphonie de Beethoven après plusieurs années, j’ai été troublé par l’ambiguïté de cette musique et du discours qui l’accompagne. Son dispositif instrumental et vocal et son énergie globale se déploient sous la direction d’un chef, allégorie d’un dirigeant menant une masse humaine à la baguette. J’ai eu un sentiment d’écrasement, de puissance étrange alors même que le poème de Schiller parle de l’amour entre les peuples, et que l’œuvre voudrait figurer un élan universel et symbolique. J’ai voulu avec Sinfonietta IX questionner ces éléments présents dans l’œuvre de Beethoven (levée du chœur telle une armée qui se met en marche, puissance des gestes musicaux et des masses sonores) qui la rendent, à mon sens, très équivoque et terriblement actuelle dans son rapport au pouvoir. »

Zad Moultaka

Freude, schöner Götterfunken,
Joie, belle étincelle des dieux.

Tochter aus Elysium,
Fille de l’Elysée,

Wir betreten feuertrunken,
Nous entrons l’âme enivrée

Himmlische, dein Heiligtum.
O céleste, dans ton sanctuaire

Deine Zauber binden wieder,
Ton charme unit de nouveau

Was die Mode streng geteilt ;
Ce que la mode séparaient ;

Alle Menschen werden Bruder,
Tous les hommes deviennent frères,

Wo dein sanfter Flügel weilt.
La où plane ton aile si douce.

Sur un poème de Friedrich von Schiller de 1785
Langue chantée : allemand

Création: 14 juin 2018
Lieu : Arsenal de Metz
par  l’Orchestre National de Lorraine
Julie Robard-Gendre, mezzo soprano
Chœur national de Corée & Chœur de Andong
direction Jacques Mercier

22 juin 2018  Les Fuseaux, Saint-Dizier
par  l’Orchestre National de Lorraine
Julie Robard-Gendre, mezzo soprano
Choeur Nicolas de Grigny
direction Jacques Mercier

© ŠamaŠ éditions musicales 2018

olyrix.com 16/06/2018  Céline Wadoux

Sa Sinfonietta IX, création pour mezzo-soprano, chœur et orchestre, retravaille la ligne mélodique de la Neuvième symphonie de Beethoven. Zad Moultaka redéfinit le message de l’œuvre, et « Alle Menschen werden Bruder » (tous les hommes deviennent frères) se transforme en une fascinante évocation quasi-oppressante de la puissance musicale, puissance des gestes et puissance des voix.

La grosse caisse seule rythme les premières mesures martiales, suivie des trombones et de l’ajout progressif des cuivres et des vents. Les cordes prennent ensuite la coloration caractéristique d’une symphonie. De plus en plus angoissants, certains passages ponctués de pizzicati rappellent la patte de Bernard Herrmann. La ligne mélodique de l’Hymne à la joie est détournée par les cordes, quelques tons plus bas, avant une montée d’orchestre qui introduit le chœur, composé du Chœur national de Corée, préparé par Eui-Joong Yoon, et de l’Andong Civic Chorale préparé par Sang-Yun Choi.

Les premiers vers de Schiller retentissent, cette fois angoissants, agrémentés du tintement de cloches tubulaires. À l’impression d’angoisse se mêle un formidable effet de puissance, tant la projection du chœur est impressionnante. La langue allemande ne pose pas de problème de diction, ni dans les passages les plus rythmiquement saccadés, ni dans les passages ralentis. Les pieds des chanteurs sont aussi des instruments, martelant le sol comme une armée au pas. Les basses sourdent, avant de lancer un puissant contrepoint repris par des timbres de sopranos chaleureux malgré la tonalité tendue de l’œuvre.

La mezzo-soprano Julie Robard-Gendre, assise parmi le chœur, se lève et débute par des graves solennels à l’impeccable diction. Presque a cappella car seule la grosse caisse l’accompagne, elle évolue dans la partition sans difficulté, ses aigus purs, achevés par des trilles délicats, gardant la même force de projection que les graves. C’est un tonnerre d’applaudissements qui suit la fin de l’œuvre, renforcé à l’arrivée de Zad Moultaka sur scène.

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