Auf der Erde

AUF DER ERDE

08′ – 2012
musique de chambre

Cette pièce est destinée à Françoise Kubler et Armand Angster, fondateurs de l’ensemble Accroche note. Ecrite à partir du poème Nichts weißt du, mein Bruder, von der Nacht (Tu ne sais rien, mon frère, de la nuit) de Thomas Bernhard, le texte confère naturellement à la pièce sa sonorité sombre et tragique.

Nichts weißt du, mein Bruder, von der Nacht
Nichts weißt du, mein Bruder, von der Nacht,
nichts von dieser Qual, die mich erschöpfte,

gleich der Poesie, die meine Seele trug,
nichts von diesen tausend Dämmerungen,
tausend Spiegeln,
die mich stürzen werden in den Abgrund.
Nichts weißt du, mein Bruder, von der Nacht,
die ich wie den Strom durchwaten mußte,
dessen Seelen längst erwürgt sind von den Meeren,
und du weißt nichts von dem Zauberspruch,
den mir unser Mond zwischen den dürren Ästen
öffnete wie eines Frühlings Frucht.
Nichts weißt du, mein Bruder, von der Nacht,
die mich trieb durch meines Vaters Gräber,

die mich trieb durch Wälder, großer als die Erde,
die mich lehrte Sonnen auf- und niedergehn zu sehen
in den kranken Finsternissen meines Tagwerks.
Nichts weißt du, mein Bruder, von der Nacht,
von der Unruh, die den Mörtel plagte,
nichts von Shakespeare und dem blanken Schädel,

der wie Stein millionerifache Asche trug,
der hinunterrollte an die weißen Küsten,
über Krieg und Fäulnis mit Gelächter.
Nichts weißt du, mein Bruder, von der Nacht,
denn dein Schlaf ging durch die müden Stämme
dieses Herbstes, durch den Wind, der deine Füße wusch wie Schnee.

Traduction Susanne Hommel, éd. La Différence


Tu ne sais rien, mon frère, de la nuit,
rien de ce tourment qui m’épuisait
comme la poésie qui portait mon âme,
rien de ces mille crépuscules, de ces mille miroirs
qui me précipiteront dans l’abîme.
Tu ne sais rien, mon frère, de la nuit
que j’ai dû traverser à gué comme le fleuve
dont les âmes sont étranglées depuis longtemps par les mers,
et tu ne sais rien de cette formule magique
que notre Lune m’a révélée entre les branches mortes
comme un fruit du printemps.
Tu ne sais rien, mon frère, de la nuit
qui me chassait à travers les tombeaux de mon père,
qui me chassait à travers des forêts plus grandes que la terre,
qui m’apprenait à voir des soleils se lever et se coucher
dans les ténèbres malades de ma tâche journalière.
Tu ne sais rien, mon frère, de la nuit,
du trouble qui tourmentait le mortier,
rien de Shakespeare et du crâne brillant
qui, comme la pierre, portait des cendres par millions,
qui roulait jusqu’aux blanches côtes,
au-delà de la guerre et de la pourriture avec des éclats de rire.
Tu ne sais rien, mon frère, de la nuit
car ton sommeil passait par les troncs fatigués
de cet automne, par le vent qui lavait tes pieds comme la neige.

inspiré d’un poème de Thomas Bernhard

Création: 13 octobre 2012
Festival Ile de France, Concert Diptyque, Institut du Monde Arabe
par Françoise Kubler, soprano & par Armand Angster, clarinette basse

Commande de l’ensemble Accroche note

© ŠamaŠ éditions musicales 2013

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